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Décorations de la France du XIXème siècle

Temps de lecture : 9'59"

De tous temps, et notamment sous l’Ancien Régime en France, les décorations honorifiques furent largement distribuées.

Cependant, si la Révolution française, sous couvert du principe d'Égalité, les abolit, c’est au XIXème siècle, sous l’impulsion de l’alors Premier Consul Napoléon Bonaparte que naît la plus célèbre d’entre elles, l’ordre de la Légion d’honneur.

Voici ce qu’il déclare à ce sujet au Conseil d’Etat en 1802 :

Décorations de la France du XIXème siècle
« Les Romains avaient des patriciens, des chevaliers, des citoyens et des esclaves. Ils avaient pour chaque chose des costumes divers, des mœurs différentes. Ils décernaient en récompense toutes sortes de distinctions, des noms qui rappelaient des services, des couronnes murales, le triomphe ! Je défie qu’on me montre une république ancienne ou moderne dans laquelle il n’y ait pas eu de distinctions. On appelle cela des hochets ! Eh bien ! C’est avec des hochets que l’on mène les hommes. »

France Légion d'Honneur

Premier Empire, Médaille, 1802-1815, Excellent

De ce siècle, ses empires et ses républiques multiples, il nous reste donc que l’aristocratie n’est désormais plus celle du sang mais bel et bien celle du mérite.

Le projet est finalement adopté le 19 mai 1802 et il faudra attendre l’Empire en 1804 pour voir fleurir les premières boutonnières.

La société bourgeoise, notamment, s’enflamme alors pour les décorations et médailles qui mettent à l’honneur un individu et le distinguent pour sa vertu, son courage ou encore son mérite.

 

Ordres et décorations

En France, il y a deux types d’honneurs qui peuvent être accordés afin d’exprimer la reconnaissance de l’Etat envers des citoyens.

Les décorations nationales, tout d’abord, qui saluent “le dévouement, le courage ou le sacrifice”. Elles sont symboliques car, par définition, aucun prix ne saurait être accordé à ces qualités.

Et ensuite les honneurs français dont les plus importants sont les ordres nationaux incluant, bien sûr, le prestigieux ordre de la Légion d’honneur. Ces ordres comportent des règles précises, des rangs, et engagent moralement ceux qui les rejoignent.

Ce concept existait déjà bien avant la notion l’ordre moderne : on pense par exemple aux ordres de chevalerie médiévaux comme l’Ordre de la Jarretière en Angleterre ou bien encore l’Ordre du Temple en France.

France Troisième République

Valeur et Discipline, Médaille, 1870, Non

Plus “classique”, la médaille vient en second et est remise afin de récompenser l’action d’une personne sans que cela l’engage sur le long terme.

Elle peut être décernée tout autant aux militaires qu’aux civils et être portée ou non avec un ruban. C’est une décoration généralement décernée pour services rendus. Ci-dessus, en exemple, une médaille créée par Louis Napoléon et accordée aux sous-officiers et soldats pour leurs exploits.

France Croix de Commandeur de la Légion d'Honneur

Médaille, IVème

Pour résumer, une décoration honorifique peut être médaille, croix ou plaque, arborée avec ou sans ruban, appartenir ou pas à un ordre, être individuelle ou collective, civile ou militaire, voire les deux, mais, indispensablement être là pour récompenser, distinguer et saluer une exception.

Il est souvent de bon ton d’arborer cette décoration à la boutonnière, en collier ou en cravate selon les usages et les règles, suspendue à un ruban dont la matière, les motifs et les couleurs sont bien codifiés.

On distingue au XIXème siècle plusieurs types de décorations honorifiques dont voici une liste non exhaustive…

 

L’ordre de la Légion d’honneur

La plus prestigieuse ! Les décorations en son sein sont décernées pour “mérites éminents” qui peuvent être civils ou militaires.

Première distribution des décorations de la Légion d'honneur dans l'église des Invalides, le 14 juillet 1804

France Légion d'Honneur

Troisième République, Médaille, 1870, Chevalier

L’ordre comprend trois grades : chevalier, officier et commandeur et deux dignités, grand officier et grand-croix.

L’insigne de la légion d’honneur se présente ainsi : une couronne de chêne et de lauriers. En dessous, une étoile émaillée de blanc à 5 branches, cerclée de chêne et de laurier. Au centre, l’avers varie selon les époques. On y trouve pêle-mêle Napoléon Ier, Henri IV, Bonaparte ou encore Cérès lorsqu’il s’agit de représenter la République. Au revers, deux drapeaux tricolores avec la devise “Honneur et patrie” en exergue.

France Légion d'Honneur

Plaque de Grand-Officier, Henri IV, Médaille

La toute première cérémonie de remise a lieu le 15 Juillet 1804, quelques mois après la proclamation de Napoléon en tant qu’empereur. Elle se tient en grande pompe à la chapelle des Invalides. Y seront notamment décorés le comte de Rochambeau et les cardinaux Fesch et Caprara. Une seconde cérémonie aura lieu au camp de Boulogne le 15 août de la même année. Il y aura près de 2 000 personnes décorées ce jour-là, dont l'amiral Bruix et les maréchaux Ney et Soult.

France Légion d'Honneur

Troisième République, Médaille, 1870, Good

Entre 1802 et 1814, il y aura 48 000 légionnaires et seulement 1 400 d’entre eux seront des civils. On y compte des artistes, des ingénieurs, des scientifiques, aussi bien que des hommes politiques… Ingres, Foucault, Ader, Corot, ou encore Jules Renard en font partie.

Cependant, il arrive aussi que cette décoration soit refusée pour des raisons diverses et variées. En 1864, Hector Berlioz se voit proposer d’être nommé chevalier au lieu d’être payé les 3 000 francs convenus pour une commande. Il aurait alors vertement répondu "Je me fous de votre croix. Donnez-moi mon argent !".

George Sand ou les Curie auraient également décliné cet honneur.

 

Les ordres ministériels

On compte notamment l’ordre des Palmes académiques créé en 1808 et l’ordre du Mérite agricole né en 1883.

Classroom in France, XIXth century (IA generated)

France Palmes Académiques Officier

Médaille, Très bon état, Argent, 36 X

Concernant les Palmes académiques, les grades évoluent au fil du temps. On retiendra, pour le XIXème siècle, les officiers de l’université, qui deviennent officiers de l’Instruction publique en 1850 ainsi que les officiers d’académie.

Les palmes sont au départ simplement brodées, leur version sous forme de décoration métallique suspendue à un ruban violet ne datant que de 1866. Les palmes sont alors en argent ou en vermeil et le ruban violet est orné d’une rosette pour les officiers de l’Instruction publique.

 

Farm at Recouvrières, Nièvre - Corot

France Médaille du Mérite Agricole

Médaille, 1883, Good Quality, Argent, 40

L’ordre du Mérite agricole, comme son nom l’indique, est décerné par le ministère de l’agriculture et fut créé par le ministre Jules Méline en juillet 1883 :

Décorations de la France du XIXème siècle

« La population agricole est considérable : plus de dix-huit millions de français vivent de cette industrie (...) et contribuent au développement de la richesse publique. (..) Dans cet immense personnel d'agriculteurs, d'agronomes, de professeurs, de savants, le labeur est incessant, les dévouements nombreux et les récompenses rares. »

France Médaille du Mérite Agricole

Médaille, 1883, Non circulé, Argent, 42

Pour cet ordre, il s’inspire directement de celui de la Légion d’honneur. On peut tout d’abord être chevalier. Puis officier en 1887. Et enfin commandeur dès 1900.

L’inspiration ne s’arrête pas là puisque c’est l’entreprise Lemoine Fils, une joaillerie, qui est choisie pour créer le modèle original. Cette même joaillerie qui fut sélectionnée pour les insignes de la Légion d’honneur.

Elle récompense autant les travaux scientifiques que les travailleurs “sur le terrain”. Un de ses récipiendaires célèbre est, notamment, Louis Pasteur.

Décorations de la France du XIXème siècle

Cette nouvelle décoration, d’une inspiration toute rurale, suscita quelques quolibets de la part de la presse et de l’opposition en son temps.

Le sobriquet de “poireau” restera, inspiré de son ruban vert en haut et son émail blanc en bas.

Les décorations militaires

Au XIXème siècle, on compte deux décorations dédiées exclusivement aux militaires : la médaille militaire créée en 1852 et la médaille coloniale créée plus tardivement, en 1893, et qui n’est bien sûr plus distribuée de nos jours, ayant évolué en médaille d’Outre Mer en 1962.

Battle of Solferino

France Médaille militaire

Medal, 1870, Excellent Quality, Argent, 27

Cinquante ans après la Légion d’honneur, définitivement une figure de référence, Napoléon III crée la Médaille militaire en janvier 1852. Elle a pour but d’élargir l’éventail de récompenses à sa disposition pour saluer les mérites de ses troupes. Ornée d’un ruban jaune et vert, elle a pour devise “Valeur et discipline” et est destinée autant aux sous-officiers qu’aux simples soldats.

France Médaille de Saint Hélène

History, Médaille, 1857, Napoléon, Très

Mentionnons également le cas particulier de la Médaille de Sainte-Hélène créée par Louis-Napoléon Bonaparte en 1857 suite au testament de Napoléon Ier dicté lors de son exil sur l’île éponyme.

Cette médaille s’accompagne d’une petite pension et récompense tous les militaires qui ont combattu « pour la gloire et l'indépendance de la France » entre 1792 et 1815. Soit environ 405 000 survivants à l’époque.

 

Les décorations destinées aux militaires et civils

La médaille française du XIXème aussi bien destinée aux militaires qu’aux civils est celle d'"Honneur pour acte de courage et de dévouement".

Elle est destinée à ceux qui portent secours à une ou plusieurs personnes en danger de mort tout en risquant leur vie.

Une fois n’est pas coutume, son histoire s’ancre dans celle de la royauté. Si on trouve trace de celle-ci sous Louis XIV et Louis XVI, c’est Louis XVIII qui officialise son existence en mars 1820 et charge le ministère de la Marine de son attribution.

Tout d’abord médaille non portable, elle le devient en 1831 sous un ruban tricolore.

France Actes de Dévouement

Ministère de l'Intérieur, Médaille, 1887

Décorations de la France du XIXème siècle

Voici ce qu’en dit Louis-Philippe à l’époque :

“Destinées à faire naître et à entretenir parmi les gens de mer une noble émulation, les médailles ne peuvent atteindre ce but que si elles sont exposées aux regards. C'est de cette manière qu'en perpétuant dans les familles et les communes maritimes le souvenir des actions généreuses, elles deviennent véritablement pour les sauveteurs qu'elles signalent à l'attention et à l'estime de leurs concitoyens, le prix le plus flatteur de leurs efforts.”

De prime abord gérée par le Ministère de la Marine et nommée Médaille de Sauvetage ou Médaille des Belles Actions, elle est ensuite renommée par le Ministère de l’Intérieur en 1833 et prend le nom de Médaille pour Actes de Courage et de Dévouement.

Trois ministères sont alors chargés de la remettre : celui de la Marine pour les marins d’Etat, celui de l’Intérieur pour les civils et pour les militaires, et enfin celui des Travaux Publics pour les ouvriers dans les mines, les ports et les carrières.

France Actes de Dévouement

Ministère de l'Intérieur, Médaille, 1890

Si au départ elle ne peut être que d’argent, à partir de 1843, elle peut être aussi d’or. Puis enfin de bronze à partir de 1899.

Son design suit le jeu des paysages politiques divers et variés de son siècle, notamment sur l’avers, portrait de Louis-Philippe, simple inscription République Française, Napoléon III ou encore l’incontournable figure de Cérès…

Décorations de la France du XIXème siècle

Ce n’est qu’aux débuts du XXème siècle que le graveur Coudray lui donnera son apparence actuelle avec une figure allégorique du dévouement au premier plan et un incendie, un cheval emballé et une noyade en arrière-plan.

 

Les décorations civiles

Et enfin, viennent les décorations civiles les plus diverses et variées, dont la remise est souvent soumise à une longue carrière et un dévouement certain à son travail…

Notamment, pour le XIXème siècle en France, on citera : la Médaille d’honneur des PTT (1882), la forestière (1883) et la douanière (1894), la Médaille d’honneur du Travail du ministère de la Guerre (1888) et sa consoeur la médaille d’honneur du Travail pour le personnel non militaire de la Marine (1894), ou encore de l’administration pénitentiaire (1869).

France Ministère de la Guerre

Honneur et Travail, Médaille, 1958, Excellent

En filigrane de ces multiples récompenses et distinctions, dont la plupart perdurent de nos jours, ayant évolué au gré des réformes au fil du temps, l’histoire d’un siècle en marche vers le progrès et la révolution industrielle et celle d’une société naviguant à vue dans le chaos politique post-révolutionnaire qui tend peu à peu à se stabiliser au fil du siècle qui s’écoule crânement, entre Empires, Restauration et Républiques.


Iconographie:

  • "L'homme au noeud papillon rouge" par l'IA Midjourney (2023) (Tous droits réservés)
  • "Portrait de Napoléon Bonaparte, Premier consul, en uniforme de général de l'Armée d'Italie" par Andrea Appiani (1801) (CC)
  • "Première distribution des décorations de la Légion d'honneur dans l'église des Invalides" par Jean-Baptiste Debret (1812) (Domaine public)
  • "Une salle de classe" par l'IA Midjourney (2023) (Tous droits réservés)
  • "Ferme de Recouvrières, Nièvre" par Jean-Baptiste Camille Corot (1831) (Domaine public)
  • "Portrait de Jules Ménine" recréé par l'IA Midjourney (2023) (Tous droits réservés)
  • "Le poireau" par l'IA Midjourney (2023) (Tous droits réservés)
  • "Bataille de Solférino" par Adolphe Yvon (1861) (Domaine public)
  • "Portrait de Louis Philippe" par Franz Xaver Winterhalter (1841) (Domaine public)

NB : Veuillez noter que, comme précisé ci-dessus, certaines images ont été créées avec l'aide de l'IA.


Sources :

Sélection publiée le 09/11/2023